Je souhaite féliciter les organisateurs toulousains pour le succès de leur édition (et je connais l'investissement, ayant eu la chance de faire partie des fondateurs d'Agile Toulouse en 2008...)
L'an dernier, j'étais resté perplexe : ces histoires de bonheur au travail... trop ambitieux il me semblait.
On s'éparpille parfois dans cette "communauté". Mais cette année, j'ai trouvé le programme cohérent et intéressant. D'abord septique avec cette thématique de "Retour Ô Sources" (bien que le double emploi du mot "sources" est assez ingénieux), j'ai rapidement été rassuré par l'intérêt qu'ont apporté les acteurs au sujet.
Fallait-il encore rappeler qu'on dévie allègrement du Manifeste Agile dans les diverses "transformations" ?
Et bien oui, il faut le faire sans cesse, merci de me l'avoir rappelé, alors qu'il m'arrive de désespérer.
On va bien arriver à faire prendre conscience que l'Agilité dévoyée n'aboutit qu'à de minces résultats, teintés de doutes et de peines.
La conclusion que m'évoque cette journée :
Marc Halevy légitime l'Agilité en soulignant l'impérative nécessité de basculer vers d'autres façons de travailler ensemble, avec ses mots à lui. Quand la science officielle nous donne crédit... Ca fait du bien ! En gros, tout ce que l'Agilité recommande déjà mais avec une vision plus haute de la chose : la fin inéluctable du modèle pyramidale, la nécessité d'un management vraiment différent et de l'auto-gestion de ceux qui produisent. Tout cela avec un pragmatisme exemplaire, comme par exemple la nécessité de définir les responsabilités de pouvoir et d'autorité, sans lesquels l'agilité n'est qu'un rêve de 68ards romantiques.
Super idée d'avoir invité le Bataclown. Deux femmes talentueuses épient les sessions et improvisent ensuite des sketches humoristiques. Ca donne quelque chose de fou mais terriblement pertinent, nous invitant à l'introspection et l'auto-dérision. Génial, je recommande. Cet ingrédient donne une toute autre dimension à ce genre évènement. Je reconnais là la grande ouverture d'esprit des toulousains. Continuez.
Olivier revient ensuite sur la thématique de l'artisanat logiciel. Je ne suis pas sûr d'avoir compris la logique de son cheminement de pensée. "Impasse culturelle", ok, et donc ? Mais je soutiens les militants comme lui qui se mouillent pour sauver le métier du développement, qui ne s'est toujours pas remis d'une ou deux générations de dénigrement et de non-qualité. Je ne code plus (ou peu) mais quand je vois le peu de passion de certains développeurs ("des tests U, pourquoi faire ?") je me dis que je peux encore montrer l'exemple. C'est dire...
Alex qu'on ne présente plus, nous a gratifié d'un atelier "Line danse for change" particulièrement percutant. Fidèle à son habitude, Alex a l'art de créer des jeux qui permettent une analogie pertinente avec le monde réel de l'entreprise. Le propos était d'illustrer la réaction des gens au changement à travers un exercice de danse en ligne collective. Ou comment le groupe apprend et s'adapte aux changements qui surviennent en cours de route : les agents du changement, les relais, les suiveurs, les réfractaires, tout y est.
Deuxième keynote. Je ne connaissais pas Aurélien. Parallèle entre le saut à l’élastique et la conduite du changement. Le lien = l'accompagnement d'une personne qui s'apprête à sauter dans le vide. Comment la faire passer à un autre état stable. Bien vu.
L'atelier de Nils Lesieur portait sur la décomposition du besoin afin de cibler des versions livrables en prod, d'après l'exercice d'Alistair Cockburn, Elephant Carpaccio. J'ai juste zieuté donc je ne peux pas dire ce qu'il est advenu in fine. Je soutiens également ce genre d'atelier puisqu'il y a encore beaucoup à faire pour former les équipes à la décomposition du besoin. C'est une des plus importante clef du succès de l'Agilité, pas si souvent maîtrisée.
Je suis ensuite aller voir mon pote Fabrice que je croise de temps en temps chez le client. Sa prez portait sur le coaching narratif. Je ne m'attendais pas à ce qu'il parle de cela, vu le titre généraliste : "Le coach (agile) au service de la relation". Nos vies sont des histoires que l'on se raconte. J'en avais déjà la conviction (Accords Toltèques, Eckhart Tolle etc). Le coaching narratif propose d'en faire une approche dédiée. Dès qu'on dissocie les gens des problèmes et que l'on se donne la permission de changer d'histoire, ça débloque les impasses. Une session un peu savante pour certains mais qui me donne à moi de nouvelles inspirations pour mon taf. Et toc.
Le "Cerveau adaptatif" de Patrice Fornalik est une ressource à utiliser pour faciliter l'adaptation au changement. Quand les neurosciences viennent compléter efficacement la panoplie du coach. Présentation très limpide avec un exercice en live sur la sollicitation du public de ce fameux "service". Choisissez une situation stressante vécue récemment. Imaginez ce qu'en dirait Napoleon ou votre voisin. Evaluez le niveau de stress de 0 à 10 avant et après. Je suis passé de 7 à 5. C'est marrant : tous ce gens savants mettent en lumière ce que je sais intuitivement. Trouvez le déclic qui qui va libérer les gens.
La dernière : "Le logiciel : un bien commun digital ?" par Raphaëlle Bour. Pas facile de passer en dernier, surtout avec un sujet outsider, mais néanmoins digne d'intérêt. Je me suis toujours demandé pourquoi en 2016, les utilisateurs ne pouvait pas construire leur logiciel tous seuls. Raphaëlle se propose dans ses recherches d'avancer sur cette réflexion afin de ne plus "déposséder les utilisateur de leur savoir commun", qu'ils semblent perdre avec qu'un logiciel qu'ils ne développent pas. Bizarre, c'est un peu comme finir par dire : "comment se passer d'Agilité ?! Couillu... Les questions/réponses auront permis une meilleure compréhension de la présence de cette session dans un Agile Tour. Mais pour ma part, le propos de l'agilité est avant tout de raccourcir le lien entre les utilisateurs et le développeur, afin que justement, personne ne soit dépossédé de son savoir. Car de développeurs, nous ne sommes pas prêts de nous passer !
Bref, un Agile Tour sous le signe du dev et la conduite du changement essentiellement. Une fois de plus, je ressens des tendances fortes dans le discours dominant :
- Approche scientifique (quelle qu'elle soit) : Noétique, Lean Start'up etc
- Dénonciation de l'agilité dévoyée. Scrotum, quand même, il fallait oser. Ca en dit long sur le ras le bol des coaches (et de tous ceux qui subissent les transformations foireuses). Le grand trouble dans la Force...
- Craftsmanship 2.0 : ça grossit, ça s'énerve (parfois trop à mon goût), pour la bonne cause
- Prise de conscience de l'importance du coaching plus que du mot "Agile" : sans cela, le changement restera le poisson et ne deviendra jamais la canne à pêche. Business is business, ca en arrange pas mal.
Je regrette toutefois que le sujet du management n'y ait pas été plus présent, car c'est pour moi le plus gros enjeu de l'agilité actuelle. Mais bon, il s'agissait de retour aux sources...
Promis, l'an prochain je ramène ma fraise !